Une scène de 30 minutes a fait de ce film de casse méconnu le plus grand de tous les temps

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Le film de casse est depuis longtemps un pourvoyeur de fraîcheur cinématographique, de Heat de Michael Mann à Ocean’s Eleven de Soderbergh. Pourtant, le champion de tous les films de braquage est un film réalisé des décennies avant que le genre du braquage n’atteigne son apogée en Amérique du Nord. Le Cercle Rouge, classique de Jean-Pierre Melville réalisé en 1970, est l’un des films les plus uniques et les plus influents de l’un des genres cinématographiques les plus féconds. En établissant ce que le film de casse moderne pourrait être, Melville fait de l’apogée de son film une séquence de 30 minutes filmée avec une précision chirurgicale et presque aucun dialogue, mais le public est tenu en haleine, d’une manière dont des films beaucoup plus frénétiques ne pouvaient que rêver.

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Comment Jean-Pierre Melville gère le casse du Cercle Rouge

Image via Variety Distribution

Jean-Pierre Melville réalise le casse du Cercle Rouge grâce à une mise en scène d’une grande précision et à une écriture solide comme le roc. Ce qui manque au Cercle Rouge en termes de personnages loufoques, il le compense par une mise en scène parmi les plus précises jamais vues dans le genre policier. Cela n’est jamais aussi évident que lors de la séquence de casse la plus connue du film, mais cette séquence ne serait pas aussi efficace si le film ne l’avait pas préparée. Alors que le condamné froid et froid est un cliché bien usé en 2023, le traitement de l’archétype par Melville est encore rafraîchissant 53 ans plus tard. Le public ne voit jamais rien d’autre que la motivation de nos personnages principaux pour l’argent, et pourtant nous sommes tout aussi investis que pour des personnages beaucoup plus complexes comme le Sonny d’Al Pacino dans Dog Day Afternoon. Cela témoigne à la fois de l’habileté de Melville en tant que cinéaste et du fait qu’Alain Delon était très cool sur grand écran. La motivation de chacun est très simple. Gagner de l’argent, ne pas retourner en prison. Melville utilise cette motivation très simple comme vecteur de l’un des plus beaux films policiers jamais réalisés sur celluloïd.

Le casse de ce film est le meilleur exemple de ce que Melville est capable de tirer d’une prémisse dont la plupart des réalisateurs ne tireraient qu’une fraction de matière. Alors que la plupart des réalisateurs considèrent le casse comme une expérience stressante et rapide, Melville l’aborde avec distance. La manipulation d’une serrure jusqu’à ce qu’elle s’ouvre, le vol minutieux de bijoux et la fuite avec le butin sont présentés avec la rigueur sans paroles de professionnels chevronnés. Nous n’avons jamais droit au faux stress souvent imposé dans d’autres films de casse, où les gens font tout foirer ; ces personnages sont des professionnels et agissent en tant que tels. Même le tireur d’élite, l’ancien flic alcoolique Jansen, parvient à faire son travail correctement, et tout se déroule comme prévu. Nos héros parviennent à s’enfuir avec les bijoux, et un espoir les attend, avec un gros coup qui vient d’être accompli.

Pourtant, il n’y a pas de bonheur dans la vie d’un criminel. Même lorsque vous réussissez à faire un gros coup, le bras long de la loi continue de s’abattre sur vous. Ce qui fait du Cercle Rouge un film unique, c’est la distance avec ses protagonistes. Comparé au jeu du chat et de la souris de Heat, ou au charisme brut des acteurs des films Ocean’s, la façon dont nos héros se font systématiquement attraper et tuer à la fin du film en fait une expérience unique pour le public. Ces personnages étaient suffisamment habiles pour réussir un casse complexe, mais ils ont été victimes d’un piège classique. Ces personnages sont à la fois des criminels stoïques au-delà de toute mesure, et tellement désespérés qu’ils tombent dans un piège. C’est cette dynamique qui rend le film unique, même des décennies après sa sortie.

Les similitudes entre Jean-Pierre Melville et Robert Bresson

Le Cercle Rouge s’ouvre sur une citation attribuée au Bouddha, mais qui vient de Melville lui-même. Siddhārtha Gautama, le Bouddha, dessina un cercle avec un morceau de craie rouge et dit : « Lorsque des hommes, même sans le savoir, doivent se rencontrer un jour, quoi qu’il puisse arriver à chacun d’eux, quels que soient leurs chemins divergents, ce jour-là, ils se réuniront inévitablement dans le cercle rouge ». Melville dévoile le jeu du film dès les premières minutes, mais la tension parvient à atteindre des niveaux jamais vus dans d’autres films de casse. Ce film est très proche d’un autre maître français, Robert Bresson, et de son film Un homme s’est échappé (1956).

Robert Bresson vous dit que Fontaine va s’échapper, mais vous restez tout de même sur le fil du rasoir. Melville fait de même ici. Il est clair que nos héros, indépendamment de ce que nous voulons pour eux, devront inévitablement faire face aux conséquences de leurs actes. Le fait de commettre le crime entraînera inévitablement leur perte. C’est pourquoi Melville met l’accent sur leurs compétences, leur précision et leur réussite en tant que criminels, ce qui ne fait qu’accentuer cet affrontement inévitable.

Ce qui fait que Le Cercle Rouge résiste à l’épreuve du temps, c’est qu’il n’y a pas de succès. Le casse n’est qu’un fantasme, un moyen d’atteindre quelque chose que ceux qui sont forcés de voler ne pourront jamais atteindre. Le cinéma cool de Melville a certainement influencé ce qui a suivi, mais le nihilisme de ce film n’a jamais été reproduit. Le Cercle Rouge est le seul film de casse à être aussi écrasant que cool. Vous voudrez peut-être être Alain Delon, mais au fond de vous, vous savez ce que cela vous apportera. Un chef-d’œuvre de film de casse, qui n’a pas d’équivalent.

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